Elle est brune et ténébreuse. Elle promène sur le monde son regard empreint de supériorité. Elle est distante et mystérieuse. Elle parle peu, n’admet pas la réplique. Reine dédaigneuse, elle a sa cour. J’en fais partie. Je suis de ceux qui recherche une attention, un mot, un geste, même méprisant. Lorsque cela se produit, je le revis dans ma mémoire, je le répète et l’extrapole. Quand j’en ai extrait et savouré le jus amer, je reviens à la source précieuse. Je cherche de nouveau à l’approcher, sans jamais oser la toucher, à me faire remarquer sans oser l’aborder. Elle est si parcimonieuse dans ses égards. Je m’épuise et j’enrage. Je rêve de lui arracher son vêtement noir, d’effacer ce maquillage noir sur ses lèvres, d’ébouriffer ses cheveux noirs trop bien coiffés. Que trouverai-je ? Je cauchemarde de découvrir une froideur de l’intérieur, un cœur qui battrait dans le vide. Je l’observe, ses yeux me percutent. Je la scrute. Là, une lueur, une douceur, moins que l’espace d’un instant. Elle se détourne, son dos me donne congé. Et pourtant, je suis sûr d’avoir vu, entraperçu, deviné. Je dois savoir. Je me résous à faire ce dont je ne me serais jamais crû capable. Je m’arme d’un courage que j’ignorais. Je me poste devant chez elle au petit matin. Je me dissimule dans le gris urbain, la main dans la poche, prêt à dégainer. L’attente est l’atout maître de mon action. Elle apparaît, regard de biais, marque un arrêt. C’est le moment. Je sors mon appareil, cadre pour mieux la saisir. Elle ne m’a pas repéré, déjà s’éloigne, hautaine. Je vérifie ma photo, son image. Je sais que, maintenant, ce que je possède d’elle est bien réel. Le corps légèrement en retrait, les mains s’assurant sur les murs, l’hésitation ferme ses traits ; Je connais sa fragilité.
L’admirateur
Taggé amour, corps, main.Mettre en favori le Permaliens.